2013-2014 : textes travaillés

1- SUR UN EXTRAIT DE L'OPERA DU DRAGON de HEINER MULLER




Heiner Müller, né le 9 janvier 1929 à Eppendorf (Saxe), est un dramaturge, directeur de théâtre, poète est-allemand, mort à Berlin le 30 décembre 1995 à l'âge de 66 ans.
Le théâtre de Müller est majoritairement constitué de réécritures d'anciens mythes. Le dramaturge établit ce qu'il appelle un "dialogue avec les morts". Sophocle, Euripide, Shakespeare (Hamlet machine),…

En 1944, Heiner Müller est mobilisé dans le Volkstürm, service obligatoire pour les hommes qui n'ont pas encore, ou n'ont plus, l'âge d'être au front. En 1951, ses parents partent pour l'Ouest. Heiner Müller ne les suit pas. On lui a souvent demandé pourquoi. Les réponses varient : “ les impôts sont moins lourds à l'Est ”, “ ici, je suis le premier, puisque les autres sont partis ”…
Il vit à Berlin, commence à écrire. Avec sa femme, Inge, il écrit la première version de Der Lohndrücker (Le Briseur de-salaire), qui reçoit le prix Henrich Mann en 1959, mais, deux ans plus tard, l'année de la construction du mur de Berlin, sa nouvelle pièce, Die Umsiedlerin (L'Émigrante), est interdite après une seule représentation.

Il est exclu de l'Union des écrivains. Et puis sa femme se suicide. C'est alors qu'il semble se détourner de son époque, tout au moins il en parle par le biais des anciens, Shakespeare, les Grecs. Pour Benno Besson, il adapte Œdipe Tyran de Sophocle et Hölderlin. Il continue avec Empédocle et Philoctète, créés en RFA et en Suisse.

Son théâtre est connu à l'Ouest mieux qu'en RDA, où d'ailleurs son adaptation de Macbeth, publiée en 1971, est interdite pour crime de “ pessimisme historique ” – reproche habituel, notamment à propos de Quartett où l'on voit Merteuil et Valmont, les héros des Liaisons dangereuses, se retrouver dans un bunker, après la Troisième Guerre mondiale. Ce à quoi Heiner Müller répond qu'imaginer deux survivants après une telle guerre, c'est faire preuve d'optimisme...
De 1970 à 1976, il est conseiller artistique au Berliner Ensemble. Bien qu'habitant dans une HLM sans grâce, toujours en butte aux tracasseries officielles, il mène une existence relativement privilégiée. Il voyage aux États-Unis, en Europe, et partout son œuvre est jouée.
En 1989, il dit que, de son vivant, le mur de Berlin ne disparaîtra pas. C'est qu'il a continué de s'opposer, et de prédire à l'“ Allemagne unifiée ” les pires tourments.
En tout cas, le voilà une fois de plus dans une situation ambiguë : nommé président de l'Académie des arts de l'ex-RDA menacée de fermeture, il se trouve “ récupéré ”.
Il accepte cependant pour “ assumer une obligation, tenter une transformation fondamentale. Il y a des choses à sauver, ne serait-ce que l'expérience d'échec. (Le Monde du 10 octobre 1990).
Cette nouvelle tâche lui sert peut-être d'alibi, car il n'écrit plus. Comme la plupart des intellectuels ayant connu la gloire en RDA, il est couvert d'insultes.
On l'accuse d'avoir servi d'informateur à la Stasi. Il reconnaît avoir eu des contacts, d'ailleurs inévitables dans sa position :
 “ On me demandait mon avis sur telle ou telle affaire. Je savais que je ne parlais pas à l'armée du salut, et je devais savoir quand il était préférable de mentir ” (Le Monde du 13 janvier 1993).

La même année, il est nommé à la direction du Berliner Ensemble. Le vieux théâtre est trop plein de comptes à régler avec l'Histoire. Heiner Müller est malade. Opéré d'un cancer de l'œsophage, il continue pourtant à vivre. Assez longtemps pour mettre en scène au Berliner Ensemble l'Arturo Ui de Brecht le plus corrosif sans doute que l'on ait pu voir, montrant un homme quelconque qui prend le pouvoir, parce qu'en face de lui, il n'y a rien.

L'OPERA DU DRAGON.

Le thème est celui du pouvoir et de la vacuité de l'opposition: "Ils sont géants parce que nous sommes nains".
Dans L’Opéra du dragon,  Heiner Müller réinvente la pièce d’Evgueni Schwartz Le Dragon, elle-même inspirée d’une figure mythique qui a traversé différentes cultures et contes ancestraux.
Écrit en 1968 comme un livret d’opéra destiné à être mis en musique par Paul Dessau, le texte fut vite considéré par son auteur comme autonome. Si sa forme lui donne une place à part dans l’ oeuvre du dramaturge, cette fable rejoint pourtant ses préoccupations politiques en ce qu’elle pose la question de la tyrannie et de la servitude volontaire.

Il était une fois un peuple qui, de lui-même, s’était placé sous l'empire du dragon par crainte du choléra. En contrepartie, le monstre réclame chaque année son tribut de chair fraîche que les citoyens livrent sans frémir.

Le succès en France est lié à la mise en scène Johanny Bert.
L’Opéra du dragon d’Heiner Müller impressionne par sa sobriété incisive et son inventivité constante. S’il fut à l’origine un livret d’opéra, il est ici utilisé comme un texte théâtral à part entière qui, sous l'apparente naïveté de la fable – croisant contes et mythes populaires – laisse affleurer le thème du pouvoir. Suite à L’Opéra de quat’sous de Bertolt Brecht, créé en 2008, Johanny Bert confie une nouvelle fois à des marionnettes la parole d’une oeuvre politiquement engagée. Tête articulée et silhouette masquée par un grand tissu, à l’intérieur duquel se glisse une partie du corps de l’acteur, l’oppression est ouvertement suggérée. Quatre comédiens, dont une récitante, manipulent à vue ces « corps-costumes », leur insufflant mouvement, voix et présence tandis que le musicien Thomas Quinart, à la fois DJ et homme-orchestre, les accompagne de son insolite ménagerie sonore. Tous induisent avec humour et poésie un dialogue subtilement réglé entre mots, sons et gestes.
Vidéo sur You tube

2- SUR UN EXTRAIT DES PRETENDANTS DE JEAN-LUC LAGARCE



Atelier T2A 2013-2014 : Les PrétendantsVoir davantage sur le lien sur http://caronlouise.blogspot.fr

Travail sur des extraits des Prétendans de Jean-Luc Lagarce
Qui est J-L. Lagarce ?
Jean-Luc Lagarce (1957-1995) est actuellement l’auteur contemporain le plus joué en France. Metteur en scène de textes classiques aussi bien que de ses propres pièces, c’est en tant que tel qu’il accède à la reconnaissance de son vivant. Depuis sa disparition, son œuvre littéraire (vingt-cinq pièces de théâtre, trois récits, un livret d’opéra…) connaît un succès public et critique grandissant ; elle est traduite en vingt-cinq langues. Les Prétendants
Cette pièce a été écrite dans le cadre d'une commande de l'Espace Planoise (Besançon) et du ministère de la Culture.
Comment allons-nous avec l'atelier T2A attaquer ce travail ?
Tout d'abord, contrairement à ce qu'en dit J-P. Vincent  nous n'essaierons pas d'être vrais à la façon des AMATEURS. Je crois que J.P. V. se trompe d'analyse.
Comme beaucoup de metteurs en scène, il pense qu'il y a une fraîcheur de jeu, une vérité qui vient de M. Tout le Monde, de la rue et que le comédien professionnel aurait perdu à cause du travail et de l'interprétation.

Nous allons au contraire partir du jeu pour aller vers la vérité du mot.
Travailler Lagarce c'est tout d'abord faire un travail sur la précision du discours et sur les sentiments qui se dissimulent sous les mots.

Si on se contente d'analyser la situation, elle est très banale: un nouveau directeur , dans notre cas une directrice plus jeune flanquée de sa jeune collaboratrice dont on ne sait quelle place elle va prendre, parachutée par le ministère de la culture. Elle est intronisé pour prendre la succession de l'ancien directeur jugé has been.

Si on se contente d'un réalisme total on tombe dans le sit-com à la française car tous les ingrédients sont réunis pour rester au ras des rapports humains.

Pour des raisons de distributions nous vans été amenés à concentrer l'action sur 9 personnages au lieu des 17 initialement prévus.
Les rôles des vieux du conseil d'administration etde  Mariani le représentant du ministère ont dû être sacrifiés à notre grand regret, mais la présence de ce dernier (hors-jeu) pèsera tout de même sur la petite communauté.
Nous aurons donc à traiter deux plans: le plan des rapports intimes (entre couples) et le plan des rapports de pouvoir entre les individus au sein du Centre culturel.
La bataille des anciens et des modernes.

Sont rassemblés sur scène les anciens et les nouveaux dans un huis-clos que je lis comme Tchékovien. Cette pièce ramène à la Cerisaie, passation de pouvoir d'une maison perdue qu'il faut sauver et quitter.

Les personnages ne seraient que des archétypes avec un rôle assigné à l'avance (l'arriviste, le conservateur, l'introverti, la peste…) si nous ne trouvions pas à faire surgir de leurs discours des sentiments.
Pour donner une vraie vie à la pièce, il faudra respecter le discours et sa précision, tout montrer sans dissimulation, mais trouver dans les personnages, gestuelle, attitudes qui dérapent comme le discours lui-même, afin que la réalité elle-même passe au travers du prisme du théâtre pour que le spectateur n'assiste pas à un film réaliste ou une série télé, mais à une déliquescence des rapports humains, dans des relations/ non-relation.

Au niveau de la scénographie, nous profiterons du lieu de répétition et de sa froideur qui cadre avec le "décor" pour élaborer un espace scénique qu'il faudra organiser et désorganiser en fonction du désordre qui va se créer.

Aucun commentaire: